Travailler dans le secteur public, c’est souvent vu comme un choix « tranquille », garanti à vie, avec peu de perspectives d’évolution. Mais est-ce vraiment la réalité ?
En France, la fonction publique emploie plus de 5 millions de personnes, dans des métiers qui vont bien au-delà des clichés : santé, numérique, justice, éducation, finances, culture, environnement… Pourtant, les idées reçues persistent.
Faire carrière dans le secteur public, est-ce une bonne option aujourd’hui ? Quelles sont les vraies opportunités, les défis à anticiper et les clichés à oublier ?
Pour y voir plus clair, j’ai échangé avec Céline, formatrice RH qui accompagne salariés et organisations depuis plus de dix ans.
Dans cette interview, elle nous partage son regard sur le secteur public, ses forces, ses limites et ses perspectives.
Agréable lecture à toi
Bienvenue à toi Céline. Avant de commencer, accepterais-tu de te présenter stp ?
Je m’appelle Céline, je suis formatrice et consultante RH avec plus de dix ans d’expérience dans le privé, le public et l’associatif. Spécialisée en psychologie du travail et en RPS (Risques psycho-sociaux), j’accompagne étudiants, pros et organisations.
Ce qui me guide : l’humain derrière la fonction RH. J’ai aussi à cœur de porter les sujets de diversité, d’égalité et d’inclusion, pour construire des environnements de travail plus justes.
Rentrons tout de suite dans le vif du sujet.
Pourquoi choisir une carrière dans le secteur public aujourd’hui ? Quels sont les grands atouts de la fonction publique par rapport au secteur privé ?
LES ATOUTS DU SECTEUR PUBLIC VS LE SECTEUR PRIVÉ
Les atouts du secteur public
Choisir la fonction publique aujourd’hui, c’est avant tout choisir la stabilité, mais aussi un engagement et un impact.
C’est faire partie d’une chaîne, contribuer à la mise en œuvre des politiques publiques et surtout les rendre vivantes et concrètes au service des citoyens.
Mais ce n’est pas que ça : c’est aussi donner du sens à son travail et servir l’intérêt général.
Les fausses idées reçues
Contrairement aux idées reçues, la fonction publique regroupe une diversité de métiers et de profils : éducation, santé, justice, culture, numérique, finances… On peut y trouver sa voie, même quand on ne l’avait pas envisagé au départ.
Souvent, tout commence par une rencontre ou une découverte.
C’est justement le rôle des salons et forums : le Salon Paris pour l’Emploi, le Forum de l’Emploi Public, le Salon de la Fonction Publique Territoriale, mais aussi des rendez-vous plus tournés vers l’innovation comme VivaTech, où le secteur public vient présenter ses projets liés au numérique et à la transition.
Ces événements sont autant d’occasions de rencontrer des recruteurs, de poser ses questions et de voir concrètement la richesse des parcours et des possibles.
Et quels sont les principaux défis rencontrés par ceux qui y travaillent ?
LES DÉFIS DU SECTEUR PUBLIC
La barrière à l’entrée
Les défis, c’est d’abord d’y entrer quand on n’est pas déjà fonctionnaire, et de réussir à faire sa place.
Beaucoup commencent comme contractuels : la titularisation peut se faire après trois ans, parfois six, et encore… seulement si aucun fonctionnaire ne s’est positionné sur le poste.
C’est donc un parcours qui demande patience, persévérance… et parfois instabilité.
Le cadre spécifique
Il y a aussi le cadre en lui-même : la fonction publique repose sur une chaîne de contrôle et de conformité, ce qui est normal puisque l’on parle d’argent public.
C’est plutôt rassurant que les contrôles soient présents, mais cela rallonge parfois les délais et peut freiner les opportunités.
Ceux qui réussissent à naviguer dans ce système développent une endurance, une rigueur et une capacité à s’adapter.
Et selon toi Céline, y a t-il de réelles opportunités de carrière et de progression dans le secteur public ?
LES OPPORTUNITÉS DE CARRIÈRE DANS LE SECTEUR PUBLIC
Oui, il y a de vraies opportunités dans le public.
On oublie souvent les départs, notamment en retraite, qui ouvrent beaucoup de postes et créent une demande forte de renouvellement.
Les possibilités de progression existent réellement : par concours, par mobilité interne ou en se spécialisant dans certains domaines.
On peut évoluer, parfois plus qu’on ne le pense.
Mais il ne faut pas tout attendre de l’administration : il faut se former, rester en veille, être proactif et construire son parcours comme un projet à part entière.
Ceux qui prennent cette posture trouvent des perspectives intéressantes et parfois inattendues.
Il ne faut pas tout attendre de l’administration : il faut se former, rester en veille, être proactif et construire son parcours comme un projet à part entière.
Et y a t-il des étapes avant ? Ou ça peut tomber d’un coup ?
COMMENT PROGRESSER DANS LE SECTEUR PUBLIC
Souvent, il y a des étapes, surtout via les concours.
Mais il existe aussi des voies plus directes : certains commencent par un contrat, passent ensuite les concours, d’autres sont titularisés après plusieurs années comme contractuels.
Donc non, ça ne tombe pas d’un coup, mais ce n’est pas non plus une route unique et fermée.
Il faut s’accrocher, se donner du temps et voir ça comme un projet de vie et de carrière à construire pas à pas.
Est-il possible de passer facilement du secteur public au secteur privé, et inversement ?
PASSER DU PUBLIC AU PRIVÉ
C’est possible, et même de plus en plus fréquent, de passer du public au privé et inversement. Mais il faut savoir traduire son expérience : le langage administratif du public peut sembler lointain, voire incompréhensible pour un recruteur du privé.
L’enjeu, c’est de savoir vulgariser son parcours et de montrer la valeur ajoutée de ses compétences. D’où l’importance de rester en veille, des deux côtés.
Aujourd’hui, on fait d’ailleurs de plus en plus appel au privé pour certains profils, notamment dans le numérique.
Et pourtant, les compétences transférables sont bien là : gestion de projet, RH, juridique, finance etc. Tout est une question de présentation et de capacité à faire le lien.
Merci pour tes recos.
Parlons « cash » maintenant. La fonction publique est-elle vraiment moins bien payée que le privé ?
SALAIRE DANS LE PUBLIC VS SALAIRE DANS LE PRIVÉ
Oui, en début de carrière, le public paie souvent moins que le privé. Les grilles salariales sont fixées par décret, donc peu de marge de négociation individuelle.
Les contractuels, eux, peuvent parfois négocier leur salaire, mais dans une moindre mesure.
En revanche, certaines filières comme la santé, l’ingénierie, la pénitentiaire ou la recherche restent attractives, avec des primes et dispositifs spécifiques.
La progression est encadrée : plus lente que dans le privé, mais aussi plus transparente et prévisible. On sait où l’on va.
C’est une vraie différence culturelle : dans le public, tout est cadré, alors que dans le privé, on peut négocier plus librement… mais aussi subir plus de disparités.
Et avec la mise en place de la transparence des rémunérations, qui interdit de demander les bulletins de salaire aux candidats du privé, l’écart de pratiques entre les deux mondes va continuer à se réduire.

Et lorsqu’on retire le salaire, quels avantages non financiers (sécurité de l’emploi, équilibre vie pro/vie perso, formation…) faut-il prendre en compte ?
LES AVANTAGES NON FINANCIERS DANS LE PUBLIC
Si on replace la question dans le contexte actuel du recrutement, on constate, et l’APEC l’a démontré dans sa récente étude sur l’emploi des cadres, que le marché du travail est très tendu.
Après plusieurs années de croissance, les recrutements de cadres ont reculé de près de 8 % en 2024, et devraient encore baisser d’environ 4 % en 2025, repassant sous la barre des 300 000 embauches. Les jeunes diplômés et les profils débutants sont particulièrement touchés, et les disparités régionales s’accentuent.
C’est donc un agenda stratégique pour le secteur public, qui doit attirer et fidéliser davantage de talents.
La sécurité de l’emploi reste un atout évident, surtout dans cette période.
- Mais il n’y a pas que ça : les congés, les horaires plus stables, un meilleur équilibre vie pro/vie perso.
- La fonction publique mise aussi beaucoup sur la formation, ce qui ouvre des portes pour évoluer et construire une carrière sur le long terme.
- Enfin, la mobilité, même si elle est encadrée, permet de découvrir différents ministères ou collectivités et de diversifier son parcours.
Je partage avec toi 2 idées reçues et tu me diras si c’est vrai.
LES IDÉES REÇUES DU SECTEUR PUBLIC
Est-il vrai que « dans le public, on ne peut pas être licencié » ?
C’est faux. Il y a des procédures de sanction, et oui, on peut être licencié pour faute grave ou insuffisance professionnelle.
Est-ce que les fonctionnaires travaillent vraiment moins que dans le privé ?
Là encore, c’est un cliché. Dans la santé, la justice, l’éducation, le numérique… les charges sont énormes et parfois bien plus lourdes qu’ailleurs.
Et de façon générale, quels sont les plus gros clichés que tu entends souvent et qui ne reflètent pas la réalité ?
LES PLUS GROS CLICHÉS
Parmi les clichés, il y a bien sûr celui du fonctionnaire “planqué”, celui qu’on imagine passer ses journées à ne rien faire.
On entend aussi souvent qu’il n’y a pas de vraie carrière possible dans le public, ou que c’est un univers figé et trop facile.
La réalité est beaucoup plus nuancée : certains métiers sont extrêmement exigeants, avec une pression quotidienne forte. On y trouve de vraies compétences mises au service de l’intérêt général, et des professionnels passionnés.
Tout est une question de regard : derrière les idées reçues, il y a des parcours riches et des personnes engagées
Pour se faire recruter facilement dans le public, quels profils sont les plus recherchés aujourd’hui ? Et faut-il forcément passer un concours pour travailler dans la fonction publique ?
SE FAIRE RECRUTER DANS LE PUBLIC
Est-il facile de se faire recruter dans le public ? Pas vraiment.
La prise de décision
Le processus repose sur une véritable chaîne de décision, avec plusieurs niveaux de validation. Cela peut parfois aller vite, mais dans la majorité des cas, c’est plus long et plus cadré que dans le privé.
Les priorités
Les postes sont accessibles aux contractuels, mais la priorité reste donnée aux fonctionnaires titulaires dès lors qu’ils correspondent au profil recherché.
Les métiers en tension
Aujourd’hui, certains métiers sont en forte tension : santé, social, enseignement, numérique, RH, finances… Ce sont des secteurs où le besoin est réel et où les opportunités sont nombreuses.
La voie d’accès
Le concours reste la voie d’accès principale, mais il existe aussi des alternatives : des recrutements sans concours (notamment en catégorie C), des dispositifs spécifiques comme le PACTE (Parcours d’accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et d’État) pour les jeunes ou les publics éloignés de l’emploi, et bien sûr des offres accessibles aux contractuels (en catégorie A, B et C) sur la plateforme officielle Accueil | Choisir le service public.
En résumé : accéder aux offres dans le public demande de la patience et une vraie stratégie, mais les portes existent, surtout pour ceux qui savent cibler les métiers en tension.
Et la question que je pose à tous les invités. Quel est le meilleur conseil carrière que tu n’aies jamais reçu ou que tu pourrais donner ?
Ne pas subir, mais choisir.
La fonction publique offre de vraies opportunités, à condition de se donner les moyens de construire son parcours : se former, rester curieux, oser bouger.
Le meilleur conseil qu’on m’ait donné, et que je transmets volontiers, c’est : ne te limite pas aux cases. Trace ton propre chemin, reste fidèle à qui tu es, et c’est là que tu feras la différence.
Ne te limite pas aux cases. Trace ton propre chemin, reste fidèle à qui tu es, et c’est là que tu feras la différence.
Mille mercis Céline pour ce précieux partage et pour tous tes conseils❤️.
Si tu souhaites aller plus loin, tu peux retrouver Céline sur LinkedIn, ou faire appel à ses services ici.
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